J’ai un rapport assez ambivalent à la période des fêtes de fin d’année. Et c’est un euphémisme.
Malgré une absence totale de sensibilité chrétienne chez nous, j’ai toujours eu le droit étant enfant à des Noël dignement fêtés, notamment dans la famille de mon père. J’ai donc de nombreux souvenirs heureux et colorés de ces périodes, où l’on se retrouvait autour de ma grand-mère paternelle à Nantes, pour fêter le 24 décembre au soir Noël avec mes parents, frère et soeur, cousins, oncle et tante et mon grand-père. La famille n’était pas très étendue, mais le rituel immuable me rassurait et me confortait, les années passant.
La mise en place du sapin et de ses décorations (toujours les mêmes, tous les ans). L’apéritif au champagne pour les grands, avec plein de canapés (oui, je suis par mon père issue d’une certaine bourgeoisie provinciale) que l’on essayait de bouloter le plus discrètement possible en grand nombre. Le repas de fête (toujours le même aussi : huîtres, foie gras, saumon, chapon aux marrons et aux airelles, bûche glacée). L’ouverture des cadeaux, à minuit. Les déceptions et les bonnes surprises. Mon grand-père qui brûlait dans le feu de la cheminée les papiers cadeaux au fur et à mesure. Les tests infructueux sur les jeux (y’a pas les piles dedans ! les salauds !) Les restes à manger ensuite pendant plusieurs jours.
Quand ma grand-mère est morte, nous avons maitenu la tradition, principalement pour mon grand-père. Mais en l’absence (cruelle les premières années) de celle qui l’animait et pour qui le symbole était important, le rendez-vous a vite perdu de son charme. Au final, tout comme le 31 décembre représente pour beaucoup un repoussoir (la chouille à date fixe, c’est vrai que c’est un peu l’angoisse), Noël était devenu le passage obligé dont on se serait finalement bien passé.
Depuis la naissance de l’Héritier, la célébration a regagné un supplément d’âme. Même si l’année dernière j’ai failli l’étouffer le soir du 24 décembre (en le couchant avec son bonnet de Noël !), j’ai envie que pour lui aussi, dorénavant, ça devienne de jolis moments de partage avec ses proches, comme ça le fut pour moi pendant longtemps.
Hélàs, j’ai déjà du mal à jouer le jeu. Car aujourd’hui je ne peux me soustraire à ce qui m’échappait complétement étant enfant : Noël est avant tout une bonne affaire commerciale. Et même si je suis pourtant une consommatrice relativement moutonnière, je ne peux pas m’empêcher d’avoir la nausée à partir de fin novembre / début décembre, dès lors que les commerçants déploient les sirènes hurlantes du Papa Noël.
Ce matin, j’étais au supermarché pour faire le gros rechargement bi-mensuel. C’est un pensum auquel nous nous soumettons alternativement, l’Epoux et moi, pour ne pas être comme tous les beaufs en famille chez Carrouf’ le samedi matin avec le caddie qui craque (et les enfants qui hurlent). Ca présente quelques menus inconvénients, notamment pour les étapes de chargement et de déchargement, mais au moins, pendant ce temps, y’en a un qui peut faire des choses plus épanouissantes (dans le cas de l’Epoux ce matin, cuver les 8 litres de bières de sa soirée entre potes d’hier soir). Cette visite fut encore plus éprouvante. 1 les rayons spécial Noël sont mis en place, et ça dégueule de partout, overdose de rouge, de doré et de paillettes cheap. 2 c’est la fin du mois / début de l’autre, la paie a du rentrer, et tout le monde était visiblement très désireux de la dépenser.
J’ai de plus en plus honte de ma notre capacité à sur-consommer. Je m’en dédouane régulièrement au travers de quelques actions charitables. Aujourd’hui, c’était la collecte pour la Banque Alimentaire. Mais que sont quelques paquets de café et de riz face à ces kilos et kilos de produits que l’on essaie de nous refourguer au moment des fêtes ? Cette année encore, ça m’a mis dans un état mi dépressif mi colérique, du plus bel effet.
Arrivée dans ma voiture, il y avait dans le lecteur CD le disque qui comporte la SEULE chanson au monde qui me fait pleurer systématiquement à chaque écoute. Ca n’a pas loupé.
Découvrez Bruce Springsteen!
LA chanson, c’est donc Bruce Springsteen, The River (ce qui vous permet aussi de comprendre le titre de cette note, qui est aussi une fine référence musicale). Elle est terrible non ?
Et surtout, de bonnes fêtes hein !
(Demain, si je suis de meilleure humeur, je vous parlerai du fan club que je compte ouvrir à la gloire de Thierry Neuvic.)